11 NOVEMBRE 2017 | TEXTE LU LORS DE LA CÉRÉMONIE

Lecture par Léna Videlo

1917, c’est l’année-charnière.

Après la grande offensive allemande à Verdun de février à octobre 1916 et l’offensive alliée sur la Somme de juillet à novembre de la même année, les armées sont épuisées. La guerre d’usure s’éternise, aucun camp ne parvenant à prendre l’avantage sur l’autre.

1917

Déjà 3 ans de conflit
Déjà 3 ans à piétiner dans la boue des tranchées,
3 ans à vivre avec la faim, la vermine, le vacarme de la guerre, la mort,
3 ans pour tenter de récupérer un bout du territoire,
3 ans que les hommes s’enlisent, s’embourbent, meurent pour la patrie !
3 ans que nos femmes et nos enfants sont seuls pour labourer les champs !

A partir d’avril 1917, un espoir naît…avec l’internationalisation du conflit et notamment l’arrivée des troupes américaines.

A la tête des forces françaises, se trouve le Général Robert Nivelle qui concentre ses troupes le long du Chemin des Dames.

Le 16 avril 1917, après une préparation d’artillerie massive mais inefficace, les fantassins français montent à l’assaut. Ils sont fauchés par les mitrailleuses allemandes. Nivelle s’entête et relance ses troupes jusqu’au 15 mai, date à laquelle il est relevé de son commandement et remplacé par le Général Pétain. Les pertes humaines sont effroyables dans chaque camp : 140 000 Français et 80 000 Allemands tués, blessés ou disparus.

L’échec de l’offensive Nivelle laisse l’armée française moralement très ébranlée.

Dès le 20 mai, de graves mutineries éclatent dans les régiments du secteur de Craonne en particulier.

Elles constituent un tournant majeur dans la conception d’une guerre qui par sa violence et son enlisement, ne fait plus sens.

De cette période de la guerre, il nous reste parmi les témoignages la chanson de Craonne que se sont appropriés les poilus et dont voici le refrain :

« Adieu la vie, adieu l’amour
Adieu toutes les femmes
C’est bien fini, c’est pour toujours
De cette guerre infâme
C’est à Craonne, sur le plateau
Qu’on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
Nous sommes les sacrifiés ! »

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Nos soldats cléguérecois ont aussi été victimes de ce sacrifice inutile. 18 Cléguérecois vont mourir au Chemin des Dames entre avril et octobre 1917.

Cette même année, 10 autres périront sur les champs de bataille de Champagne et de Verdun, ou dans les hôpitaux de l’arrière.

Depuis 2014, la commission Histoire et Patrimoine sur notre commune effectue des recherches sur les soldats cléguérécois et collecte des documents témoignant de la vie à Cléguérec durant cette guerre. Les résultats des recherches seront regroupés dans un livre qui paraîtra en novembre 2018.

A ce jour, les travaux de Philippe Le Berrigaud et Jean-Yves Le Moing, ont permis d’établir une liste de 247 noms de soldats cléguérecois morts durant la guerre 14/18.

Joseph JAN né le 14 juillet 1892 a fait la guerre en tant que sergent à la Compagnie 9/13 du 6ème Régiment du Génie d’Angers et combattu sur le front de Verdun et au Chemin des Dames.

Il écrit de Nomény au nord de Nancy 2 cartes en breton à sa cousine Marie Joseph JAN

Lecture de la traduction en français par Nicolas Carré

Carte 1
Le 1er janvier 1916
Je vous souhaite une bonne année. Je pense que cette guerre se terminera cette année. J’ai pensé donc que je vous verrai avant longtemps. J’ai attrapé 8 jours dans la salle de police pour mes 3 jours de retard, mais grâce au 1er de l’an, ma punition a sauté.
A vous un cœur aimant,
votre cousin,
Joseph.
Vous me direz si vous recevez cette carte ?

Carte 2
15 janvier 1916,
Comment se fait-il que vous ne me répondiez pas ? Vous avez dû recevoir ma carte de bonne année ? Ici, dans le coin, rien de neuf. Les boches cherchent toujours à nous faire du mal. Il y a 3 jours, ils ont tué un des miens, deux autres ont été blessés. Un boulet (bombe) est tombé à 40 mètres de moi.
Bien à vous avec amour,
Joseph